Luxemburger Wort 10.8.2000

Ligue pour la protection de la nature et des oiseaux

Le Ministère de l'Environnement critiqué 

Les organisations "vertes" mécontentes de l'actuel gouvernement
© 2000 Luxemburger WortAlRo. - Un mois et demi après une première salve du Mouvement écologique (voir La Voix du 20 juin), c'est au tour d'une autre organisation "verte" - ou, à tout le moins, verdoyante -, la Ligue luxembourgeoise pour la protection de la nature et des oiseaux (LNVL), de tirer à boulets rouges sur le gouvernement. Principales personnalités dans le collimateur des écologistes: le secrétaire d'Etat à l'Environnement, Eugène Berger, et le ministre de tutelle, Charles Goerens.
D'après la LNVL, qui regroupe la bagatelle de quinze mille membres, la politique actuelle en matière de protection de la nature est, ni plus ni moins, dans une "impasse"; quant aux autorités compétentes - ou supposées telles -, elles feraient montre de bien peu de feeling dès qu'il s'agit, notamment, de concilier intérêts économiques (ou autres.) et intérêts écologiques. Première conséquence tangible de ces divergences de vues entre la LNVL, d'une part, et l'"administration", de l'autre: la ligue a décidé de suspendre, jusqu'à nouvel ordre, sa collaboration avec le Conseil supérieur de la protection de la nature (CSPN), lequel ne remplirait plus, en l'état actuel des choses, qu'une fonction d'"alibi".

Remblais illégaux

Bien qu'échaudée par ce qu'elle n'hésite pas à qualifier d'"affaire" Gréngewald, la LNVL espérait que les défenseurs de la nature ne seraient plus confrontés à d'autres désillusions de la même veine: se serait-elle réjouie trop vite? Apparemment oui, si l'on en croît le président de cette ligue, Pit Mischo, qui s'est exprimé hier devant la presse: "Vu les exemples négatifs qui se sont multipliés ces dernières semaines dans le domaine de la protection de la nature, on peut même se demander dans quelle mesure les responsables du ministère de l'Environnement représentent - et défendent - encore les intérêts de la protection de la nature."
Les griefs de la LNVL à l'encontre de ce ministère et des administrations qui gravitent autour de lui sont similaires à ceux du Mouvement écologique: ils portent notamment sur des remblais jugés "illégaux", près de Weiler-la-Tour, à proximité de la seule zone ornithologique du Luxembourg officiellement reconnue par l'organisation "Birdlife international".
"Le fait d'avoir, a posteriori, autorisé ces illégalités, au lieu de porter plainte contre les fautifs, laisse à penser que d'aucuns interprètent la législation avec une certaine liberté", a accusé M. Mischo, fustigeant par ailleurs "le manque de clairvoyance" du ministre, lequel aurait dû, selon lui, "au contraire faire en sorte de mettre une zone aussi précieuse à l'abri de tout élément perturbateur".ÿ
Dans le même ordre d'idées, la LNVL a par ailleurs stigmatisé "le manque de feeling du secrétaire d'Etat". Toujours à l'instar du Mouvement écologique, l'organisation de défense de la nature et des oiseaux reproche ouvertement à M. Berger d'avoir autorisé l'aménagement, dans le cadre d'un projet de remembrement dans la commune de Flaxweiler, de plusieurs chemins de campagne situés en un endroit qu'il aurait normalement dû faire classer comme zone naturelle protégée: "Faisant fi des compromis que les experts avaient trouvés pour ce remembrement, le nouveau gouvernement a délivré des autorisations supplémentaires allant à l'encontre de la protection de la nature", a souligné M.Mischo. Résultat: les travaux afférents auraient entraîné la disparition quasi totale de la gentianella germanica, une plante extrêmement rare dans notre pays:.

La route du Nord: un serpent de mer

Comme les autres organisations de défense de la nature, la LNVL suit de très près le dossier "route du Nord" et en arrive à la même conclusion que nombre d'entre elles: tel un serpent de mer, ce dossier n'est pas avare de (mauvaises) suprises. "Au lieu de présenter enfin un concept global de circulation, l'on ne cesse de bricoler des ébauches de solution. Comment une planification cohérente de l'aménagement du territoire peut-elle être envisagée si chaque gouvernement élabore de nouvelles variantes? Ou en est-on, dans ces discussions, avec des mesures en faveur de la protection de la nature et des paysages?", a demandé M. Mischo.

Protection à dose Homéopathique...

De manière générale, la LNVL est d'avis qu'un an après l'entrée en fonction de la nouvelle équipe gouvernementale, "des objectifs clairs et précis" en matière de protection de la nature font toujours défaut, et que "la protection de la nature continue d'être faite à dose homéopathique".
Dans l'immédiat, la ligue - qui n'a pas manqué de préciser que les griefs évoqués lors de sa conférence de presse d'hier étaient loin d'être les seuls - s'attend à une prise de position de M. Goerens. Affaire à suivre, donc.